Écoles d’art et conservatoires de musique : au-delà de la formation artistique

2 avril, 2017

Yukiyo Sugiyama

Yukiyo Sugiyama coordonne le projet Unlearning Music: Dialogues on Music, Learning and Facilitation (ULM), destiné aux professionnels de la gestion culturelle et aux jeunes artistes. Celui-ci bénéficie du soutien du programme national en faveur de l’éducation artistique au Japon.

Les conservatoires de musique et les écoles d’art, où j’ai étudié et où je travaille encore, ont longtemps été considérés comme les temples d’une formation artistique rigoureuse. Mais le climat social entourant la musique et les arts a beaucoup changé ces dernières décennies. Les institutions culturelles font donc évoluer leurs cursus, produisant de jeunes talents à l’écoute d’une société en mutation rapide et proposant des solutions créatives. Il ne s’agit pas juste d’artistes et de professeurs de musique chevronnés, mais aussi de directeurs artistiques, producteurs, éducateurs populaires et animateurs compétents. Je soutiens moi-même les spécialistes de l’éducation artistique via le programme Unlearning Music.

L’avenir de ces institutions m’inquiète toutefois. Si les instituts d’art de l’enseignement supérieur continuent à favoriser la formation professionnelle, notre statut d’institutions « d’enseignement supérieur » pourrait être menacé, d’autant plus étant donné l’attitude adoptée par le gouvernement japonais envers les domaines universitaires des arts, des sciences humaines et des sciences sociales. De plus, ces institutions semblent être négligées par une partie du secteur artistique.

De l’évaluation aux nouvelles pratiques

Au-delà de la production de nouveaux talents, comment les écoles d’art et les conservatoires de musique peuvent-ils favoriser la pratique artistique  ? Responsables de la production intellectuelle, les écoles d’art pourraient documenter cette pratique. Dans un peu moins d’un mois, nous aborderons la question de la collaboration entre enseignement supérieur et institutions culturelles lors de la conférence RESEO à Belgrade. L’évaluation, thème de la conférence de Paris l’an dernier, pourrait être une piste à explorer.

Afin d’illustrer l’importance de l’éducation artistique, nous devons démontrer que nos projets constituent une innovation intellectuelle, que ce soit sur le plan pratique ou universitaire. Les théories de la Connaissance tacite de Michael Polanyi ou de la Zone proximale de développement de Lev Vygotzky sont représentatives des thèses défendues dans les œuvres sur l’éducation artistique.

Dans mes récentes recherches, je me suis concentrée sur la façon dont les artistes perçoivent l’apprentissage à travers des activités de sensibilisation comme la pratique sociale, à la lumière de « l’apprentissage expansif » d’Engeström, à travers une approche qualitative basée sur l’analyse d’entretiens. Mais il ne s’agit que d’un aspect de l’évaluation des programmes d’éducation artistique. Ces derniers, tels qu’ils sont mis en place par de nombreux membres de RESEO, peuvent devenir une nouvelle méthodologie pratique révolutionnant les formes artistiques existantes, rassemblant ainsi les communautés qui trouvent dans l’art des normes et des valeurs communes (Je pourrais encore vous faire part de nombreuses découvertes, mais je les garde pour la prochaine fois !)

Identifier et mesurer les subtilités de la pratique est complexe et demande des recherches quantitatives comme qualitatives, surtout si l’on adopte une approche de constructivisme social. L’évaluation de projet est la clé d’une meilleure pratique. Les écoles d’art pourraient former des spécialistes de la recherche afin de développer des approches multidisciplinaires et de promouvoir de nouveaux modèles de pratiques basés sur une méthode d’évaluation solide.

Il existe des écoles d’art et des chercheurs prêts à explorer de nouveaux modèles de pratiques, à la recherche de quelque chose de nouveau et de très prometteur. Nous, les écoles d’art et les conservatoires de musique, sommes partie intégrante du monde. Nous avons des compétences et une expérience à proposer en tant qu’instituts culturels et spécialistes de la formation. En d’autres termes, c’est une des responsabilités que les écoles d’art et les conservatoires de musique peuvent assumer pour la culture.